Homme invisible pour qui chantes-tu ?, de Ralph Ellison (Grasset) — ISBN-13 : 9782246323242 — 614 pages — 13,30 € — Genre : Noyade. ✮✮✮✮✮
« Homme invisible pour qui chantes-tu ? » est le titre d’un livre de Ralph Ellison publié pour la première fois en 1952 aux États-Unis et en 1969 en France. Il s’agit d’ailleurs du seul roman achevé par l’auteur et intellectuel américain né à Oklahoma City en 1914 et mort à New York en 1994 à l’âge de 80 ans. Les autres livres publiés par Ralph Ellison l’ont été à titre posthume. Mais revenons-en à ma critique…
Il est très difficile de parler de ce chef-d’œuvre, un livre qui émeut et qui m’a touché comme peu d’autres l’ont fait. « Homme invisible pour qui chantes-tu ? » raconte l’histoire d’un homme qui se noie. Ce livre parle d’un homme qui ne cesse d’échouer malgré tout ce qu’il entreprend dans la vie. Le narrateur est pourtant quelqu’un de courageux, mais celui-ci ira de désillusion en désillusion à partir du jour où la roue s’est arrêtée de tourner du bon côté de la vie. Avant de poursuivre, je voudrais dire quelques mots sur la traduction du titre, une traduction libre qui me plaît beaucoup et bien plus que le titre original qui aurait pu être traduit simplement par : « L’homme invisible ». Effectivement, le narrateur chante son désespoir comme un blues triste et envoûtant. Mais pour qui donc est-il invisible ce narrateur ? Il s’agit d’un narrateur qui ne porte pas de nom, comme pour mieux marquer sa position d’être insignifiant. Effectivement, le narrateur est invisible, car ignoré par le monde dans lequel il vit, par les hommes qu’il côtoie. Et, toute la société ignore cet homme presque pris pour un fou alors qu’il a pourtant des choses à dire, des idées à partager. Aussi, très rapidement la machine de la vie se grippe à cause d’une stupide et naïve erreur, alors que le ronronnement du moteur indiquait que le bon chemin était pris. Mais il suffit parfois de peu de choses pour détruire les espérances d’un homme. Le narrateur est un brillant étudiant universitaire, c’est même le meilleur de sa promotion et il ne lui reste plus qu’un an à tirer avant de connaître une brillante carrière professionnelle à l’aide de son diplôme en poche. Le narrateur est un jeune homme plein d’espoir, un jeune homme naïf qui croit au lendemain qui chante, malgré les couleuvres, nombreuses, déjà avalées… Puis, le narrateur se voit confier une mission délicate par le directeur de l’université, à savoir servir de chauffeur, le temps d’une journée, à un des généreux donateurs de l’université.
Non, mon petit, ils ne dirigent pas cette école, les Blancs non plus, d’ailleurs. C’est vrai, ils la soutiennent, mais c’est moi qui la dirige. Moi, j’suis gros et noir et je dis « oui, m’sieur » aussi fort que le premier négro venu, quand c’est nécessaire, mais je suis toujours le roi ici. Je me fiche pas mal que ça n’en ait pas l’air. La puissance n’a pas besoin de s’étaler. (…) Lorsque tu détiens le pouvoir tu le sais. Les noirs peuvent bien ricaner, et les blancs crève-la-faim rigoler !
Jusqu’ici tout va bien, sauf que nous sommes aux États-Unis dans les années 40 et que le riche donateur est un homme blanc tandis que le chauffeur d’un jour est un étudiant noir. Aussi, l’homme blanc demande d’aller voir les lieux où vivent les noirs miséreux (les sans dents), et à cause d’un trop-plein d’émotions l’homme blanc finit par faire un malaise, et il est emmené voir un médecin. Tout rentre dans l’ordre, car l’homme blanc finit par expliquer que tout va bien, que le jeune homme noir n’est coupable de rien, mais l’homme blanc est quelqu’un d’occupé qui est déjà très loin, c’est un homme qui ne comprend pas la situation… En effet, le recteur de l’université ne l’entend pas ainsi. Lui veut punir celui qui n’a pas su mentir à l’homme blanc, pour lui cacher la crasse… Et c’est à partir de ce petit incident que commence la longue et vertigineuse descente aux enfers du narrateur, qui ne cesse de clamer sa vérité. Malheureusement, personne ne l’entend, personne ne le voit, c’est un homme seul qui finit par faire face au sale monde qui l’entoure, un monde qui broie et détruit. Le roman de Ralph Ellison est saisissant, percutant, inquiétant, triste. De plus, l’auteur réussit à parfaitement rendre compte de l’état d’esprit du narrateur, car ce dernier se met à nu, il nous dévoile son âme bien que personne (dans l’histoire) ne veuille l’écouter.
Qui aime les histoires de noyade ?
J’adore ton histoire de noyade. J’adore ces histoires. Je n’ai pas l’habitude de cette maison d’édition, mais là, tu me fait bigrement envie. J’ai envie de me noyer avec ce narrateur…
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Un grand livre !
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J’aime beaucoup cette collection de classiques à la couverture rouge (j’ai notamment lu « Mephisto » de Klaus Mann, qui m’a scotchée! Je l’avais même chroniqué sur mon premier blog! L’as-tu lu? Le livre, pas le blog disparu!)… En revanche, quand bien même le sujet de « Homme invisible pour qui chantes-tu? » a l’air passionnant, je pense qu’il me faudra attendre quelques temps avant de pouvoir relire une histoire de noyade. 🙂
Merci pour cette découverte en tout cas!
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Non je ne connais pas, mais je vais allé voire ça… Merci 🙂
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C’est un très beau livre, où l’on suit le personnage principal, un acteur de théâtre, puis de cinéma, en Allemagne, lors de la montée du Nazisme et l’avènement du IIIe Reich. Un livre sur la compromission de certains artistes, par moment assez effrayant.
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La compromission et la collaboration…
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Oui, je disais juste « compromission » car un artiste, c’est susceptible! 😉
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😀
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Je ne sais pas si j’aime les histoires de noyade mais celle-ci m’a l’air très intense.
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Et elle l’est !
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Je découvre tout doucement ces Carnets Rouges depuis quelques temps et j’me souviens bien avoir vu ce titre dans un rayonnage. Tu me fais drôlement envie et la prochaine fois il se pourrait bien que je le fourre dans mon sac (après l’avoir acheté bien sûr).
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C’est une très belle collection…
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J’adore ce roman, j’y pense très souvent. Ta chronique me rappelle d’ailleurs que j’avais l’intention de le relire, il faut que je trouve le temps ! Homme invisible pour qui chantes-tu ? est un classique incontournable aux États-Unis, c’est dommage qu’il soit si peu connu en France. Je repense très souvent au parcours de ce personnage singulier, perdu dans l’histoire de son pays, à sa fin si étrange et, surtout, à sa musicalité extraordinaire ! Un vrai chef-d’œuvre !
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C’est un roman que je ne vais pas oublier de sitôt… Oui, c’est un chef-d’oeuvre !
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Il est noté dans ma liste à lire (et en vO) , j’espère que ce ne sera pas trop une noyade.
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En VO, je suis impressionné… 🙂
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Je ne connaissais ni ce livre ni cette collection mais je vais très rapidement combler cette ignorance et acheter ce roman qui a l’air superbe.
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J’ai hâte de lire ton avis !
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Ca risque de prendre un peu de temps mais ça viendra 🙂
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Aucun souci 🙂
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que c’est bien raconté, évidemment que je veux le lire merci Goran!
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Merci luocine !
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Je sais qu’en venant ici, je serai séduite, tant par le livre par la chronique.
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Merci 🙂
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Mais…il faut que je le lise ! C’est ça que j’aime chez toi: tu sais donner l’envie, sincèrement et simplement, de s’approcher des classiques qui bien souvent m’intimident. Merci !
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Merci Célina, tu me fais rougir… 😳
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Elle me tente bien cette histoire de noyade ! Je note la référence 😉 et effectivement ce titre traduit est magnifique !
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C’est triste, mais bon… J’adore !
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J’adore ces histoires de noyade Goran… Un bien beau billet encore une fois… je vais certainement lire ce récit pour écouter ce chant qui m’apparaît d’une infinie tristesse…
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J’espère vraiment que tu le liras, c’est à découvrir. Impossible de ne pas aimer, il me semble.
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Intéressant, je pense qu’il pourrait me plaire 😉
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Je pense aussi 🙂
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Arf. Un de mes livres préférés s’achève par une noyade alors disons que sans les aimer follement, elles me rappellent cette fabuleuse lecture…
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Et quel est le titre de ce livre ?
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Tu es bien placé pour le savoir pourtant. ^^ (Mais ne vais pas le révéler ici pour ne pas spoiler t’sais.)
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🙂
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Je n’ai jamais aimé le titre français de ce livre et c’est d’ailleurs pour cela qu’il ne m’avait jamais attirée. Heureusement, ma sœur l’a acheté en anglais. Sinon, je serais passée à côté d’un chef-d’œuvre.
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Moi je le trouve très bien… 🙂
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