Une heure avant la fin du monde, de Joseph Roth (Liana Levi) — ISBN-13 : 9782867465277 — 149 pages — 8 € — Genre : Éclairé. ✮✮✮✮✮
Après avoir lu « Une heure avant la fin du monde » de Joseph Roth dans le cadre de La Voie des indés 2016, je tiens à remercier les éditions Liana Levi, Libfly et Aurélie, ainsi que les différents éditeurs participants à cette opération.
Avant de parler du livre, parlons un peu d’histoire ou plutôt parlons un peu des dernières recherches historiques qui tendent à montrer que personne ne savait pour la solution finale et je dois dire que j’ai énormément de mal avec ce discours. Aussi, même si je ne suis pas historien, j’ai lu quelques petits livres sur le sujet et plusieurs indices montrent quand même qu’au moins une certaine élite politique savait. De plus, dire que personne ne savait rien sur rien et je grossis intentionnellement le trait, permet aussi à la société de se trouver un alibi. Je préfère quand les hommes assument leur acte, je trouve ça plus sain. Si personne n’est responsable de rien, il n’y a plus de fautifs. Et sans fautifs il n’y a rien à changer et c’est le meilleur moyen de recommencer ses erreurs passées. Non ? En voilà un beau sujet de philosophie ! Mais je m’égare… Je veux bien certaines personnes ne savaient pas ce qui se passait et c’est fort plausible, mais… Enfin, bref, passons. Pourquoi, est-ce que je vous parle de cela ?
« La tâche de l’écrivain de ne notre temps est le combat impitoyable contre l’Allemagne, car elle est le véritable foyer du mal en notre temps, la filiale de l’enfer, le séjour de l’Antéchrist. »
Ainsi, « Une heure avant la fin du monde », de l’Autrichien Joseph Roth, est un ouvrage qui rassemble plusieurs articles du journaliste et écrivain publié entre 1928 et 1938. Et il faut dire que l’homme était sacrément lucide sur l’Allemagne nazie et son meneur. Joseph Roth attaque très fort en qualifiant par exemple le procès d’Adolf Hitler pour son coup d’État raté de mascarade, etc., etc. Voici un écrivain, journaliste et témoin d’une époque qui a su très vite que la fin du monde était proche (pour reprendre le titre de ce recueil d’articles). Joseph Roth, mort prématurément en 1939 à Paris, n’a jamais vu ni pu entendre parler des chambres à gaz, mais il y a su deviner, ressentir le mal naissant avec ce troisième Reich. L’homme n’était pas devin, il était juste observateur. Et surtout c’était un écrivain de talent. Les articles qui se succèdent sont empreints d’ironie, de dégoût et de violence, l’auteur s’emporte, s’exaspère… De plus, la lucidité et l’esprit critique de Joseph Roth autrichien font plaisir à lire. Lorsqu’Adolf Hitler fut nommé, Joseph Roth écrivit à son ami Stefan Zweig ces quelques mots : « À présent il vous sera évident que nous allons vers de grandes catastrophes. Abstraction faite du privé – notre existence littéraire et matérielle est déjà anéantie – l’ensemble conduit à une nouvelle guerre. Je ne donne pas cher de notre vie. On a réussi à laisser la Barbarie prendre le pouvoir. Ne vous faites pas d’illusions. C’est l’Enfer qui prend le pouvoir ». Merci Wikipédia ! Toujours est-il que ces mots sont d’une rare clairvoyance.
Joseph Roth était un homme passionné, exalté, mais c’est aussi et surtout un homme triste de voir l’Autriche et l’Allemagne sombrer dans l’horreur. Visiblement certains hommes de l’époque comprenaient parfaitement l’état d’urgence de la situation… Ironiquement, Joseph Roth meurt (malade, alcoolique et sans argent) quelques mois avant la déclaration de la guerre. Cet homme meurtri ne verra jamais son cauchemar se transformer…
Comprenez-vous maintenant un peu mieux où je voulais en venir un peu plus tôt ?
Merci pour la découverte Goran. Je n’ai jamais lu Roth. Le fait que cet ouvrage rassembles des articles divers m’intéresse. Je vais donc me le procurer. Merci pour cette chronique… Et je comprends très bien où tu veux en venir…
J'aimeAimé par 1 personne
Merci Cat !
J'aimeAimé par 1 personne
Ca semble être un livre très intéressant, mais en général je lis surtout des romans et des poésies, et pas trop de recueils d’articles ou écrits documentaires …
Je pense comme toi que les gouvernements des divers pays occidentaux étaient au courant pour la solution finale …
J'aimeAimé par 1 personne
Ce live se lit presque comme un roman…
J'aimeAimé par 1 personne
Je ne connaissais pas… mais ça m’interpelle.
Je note pour mes prochaines lectures
J'aimeAimé par 1 personne
Très bonne idée…
J'aimeAimé par 1 personne
Je fais le lien avec « Psychologie du pouvoir » de Manès Sperber. Un autre intellectuel autrichien face au totalitarisme et autres fanatiques.:
J'aimeAimé par 1 personne
Merci je note…
J'aimeAimé par 1 personne
Bon… je me suis interdite de librairie (mais je sors parfois mon joker), je sens que je vais m’interdire de venir sur ton blog. Comment veux-tu qu’on résiste ? Ce livre m’a l’air très intéressant, assez essentiel, même. Tu parles de sa correspondance avec Stefan Zweig qui, lui-même correspondait beaucoup avec son ami Romain Rolland, j’ai alors cherché si Rolland et Roth avait pu avoir quelques échanges ensemble. Je n’ai rien trouvé, mais je n’imagine pas que Zweig n’en ai pas parlé à Rolland. Zweig était conscient de ce que ces temps sombres annonçaient. Il n’y a d’ailleurs pas survécu.
J'aimeAimé par 1 personne
Ne t’interdit pas de venir chez moi, non, pas ça…
J'aimeJ'aime
Tu sais moi, les interdits, je les oublie vite. Et puis, ce n’est pas un ou deux livres en plus qui vont me donner le vertige du trop-plein. Il est déjà bien installé.
J'aimeAimé par 1 personne
😉
J'aimeJ'aime
Tiens, il faudrait que je lise la correspondance Zweig Rolland, j’ai lu le premier volume, franchement c’est à découvrir.
Pour en revenir à ‘ceux qui ne savaient pas’, je me demande si justement dans le livre que j’ai lu récemment, rien où poser sa tête, l’auteur Française Frenkel n’avait pas des intuitions. Sinon pourquoi aurait-elle tout fait tout risqué pour ne pas être prise par les français ou les allemands? Elle devait sentir que la mort l’attendait.
J'aimeAimé par 1 personne
C’est ce que je pense aussi…
J'aimeJ'aime
Vraiment intéressant… Je viens de voir un reportage sur Churchill qui était celui qui dénonçait Hitler mais personne ne l’écoutait à la même époque… Merci pour cette recommandation!
J'aimeAimé par 1 personne
Merci à toi…
J'aimeJ'aime
Des réflexions essentielles d’un homme particulièrement éclairé ! Merci pour ta chronique. Il est ironique en effet comme tu le soulignes qu’il soit mort juste avant la guerre mais il savait déjà…
J'aimeAimé par 1 personne
Oui il savait…
J'aimeAimé par 1 personne
Je n’ai lu de lui que La Marche de Radetzky et j’avais aimé sa plume et cette fresque historique familiale.
Le thème ici me parle et ton avis donne envie de se plonger dans cet ouvrage.
J'aimeAimé par 1 personne
Oui il a une très belle plume…
J'aimeAimé par 1 personne
Je partage l’avis de Mokamilla ; j’avais lu La marche de Radetzki qui reflète si bien la fin de la monarchie austro-hongroise, et je serais bien tenté de lire ce roman. Un grand merci à toi de dénicher des titres et des auteurs aussi intéressants (je pense entre autres à Chlokhov ou à Benjamin Constant) !
J'aimeAimé par 1 personne
Merci Patrice…
J'aimeJ'aime